Avril 2011

Dans ce numéro :

La notion de plaisir : une façon positive d’aborder l’obésité chez les jeunes   |  
Changer une habitude de vie : tout un défi !
   |   Stress et détresse chez les médecins : le PAMQ rencontre les externes 
|   Détecter les patients victimes de violence : des opportunités de formation manquées?  | 


 

La notion de plaisir : une façon positive d’aborder l’obésité chez les jeunes

 


 

Personne ne peut le nier : la prévalence de l’obésité chez les enfants québécois est en augmentation. Mais comment les futurs médecins pourront-ils faire face à ce phénomène préoccupant? La faculté de médecine de l’Université de Montréal offre aux étudiants de 4e année la possibilité de suivre une activité d’enseignement consacrée à ce sujet lors de leur stage d’externat en médecine communautaire.

En se basant sur des vignettes cliniques d’enfants d’âges différents, Dre Elisabeth Rousseau, pédiatre au CHU Sainte-Justine, livre des conseils pratiques aux étudiants sur l’approche à adopter auprès des parents pour les aider à prévenir une prise de poids excessive chez leur enfant : les éveiller à une nourriture variée en leur offrant des repas colorés pour attiser leur curiosité, rester neutre face à l’action de manger, ne pas les laisser manger devant la télévision, etc. Elle amorce également une discussion avec les étudiants sur les différentes façons d’accompagner un enfant présentant des signes d’obésité et de ne pas s'obséder sur la balance.

L’intervention du médecin permet souvent aux parents de prendre conscience du rôle qu’ils jouent dans le choix de la qualité de la nourriture de leur enfant. Ils réalisent également que leur enfant est tout à fait capable de manifester qu’il n’a plus faim grâce au signal de satiété, exprimé naturellement dès le plus jeune âge. Il est donc inutile de forcer l’enfant à finir son repas s’il montre qu’il est rassasié.

Au-delà d’appliquer une approche de soin basée sur l’interdisciplinarité et sur les évidents bienfaits procurés par une alimentation équilibrée et une activité physique régulière, il est primordial de parler de la notion de plaisir avec les parents d’enfants présentant des indices nutritionnels à risque. Une étude pilote menée en 2010 dans 6 pays, basée sur un programme communautaire intégré (Épode) centré sur le plaisir de bien manger et de bouger en s’amusant, a fait apparaître une baisse de surpoids et une stabilisation du poids chez les enfants.

En faisant preuve d’écoute, de patience et de flexibilité, le médecin pourra évaluer dès le départ la difficulté que peut représenter un tel changement pour ces familles. Il pourra mieux les aider à surpasser les barrières qu'impliquent des habitudes de vie différentes en leur rappelant qu’il faut procéder par petites étapes réalistes et réalisables, et surtout qu’il n’est jamais trop tard pour agir.

 

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Changer une habitude de vie : tout un défi !

 


 

Vouloir être plus actif, manger mieux, dormir plus… Une chose est sûre : tout le monde est déjà passé  par là. Mais comment initier un changement d’habitude ? C’est le défi lancé aux étudiants de l’externat en médecine communautaire de l’Université de Montréal.  Sensibilisés par le podomètre qui leur est remis en début de stage, les étudiants sont invités à réfléchir sur leur mode de vie actuel et à identifier les changements qu’ils aimeraient y apporter.

En acceptant de jouer le jeu, les étudiants vont se fixer des objectifs pour toute la durée du stage et noter leurs impressions dans un journal de bord. Il en ressort que la majorité des étudiants dit être confrontée à divers obstacles les empêchant d’initier un changement (emploi du temps chargé, périodes d’examens stressantes, fatigue, etc.). D’autres insistent sur le fait « qu’on trouve toujours une bonne excuse » pour ne pas passer à l’action et que les obstacles majeurs sont plutôt le manque d’organisation, de motivation et de soutien des proches.

Pour arriver à atteindre leurs objectifs, les étudiants redoublent d’idées liant l’utile à l’agréable : découper des légumes ou faire une activité physique tout en regardant leur émission préférée, faire du vélo ou marcher en écoutant de la musique, se mettre au régime en couple pour éviter les tentations, etc… Tous les moyens sont bons pour initier un changement pourvu que la notion de plaisir soit au centre des activités choisies.

Les étudiants ayant réussi à relever le défi sont formels : ils se sentent plus concentrés dans leurs tâches, de meilleure humeur, moins stressés, plus en forme et mieux dans leur peau. À l’issue du stage,  ils sont fiers d’avoir réussi leur pari et ont une meilleure estime d’eux-mêmes. Mais ils réalisent aussi « qu’il est plus facile de perdre une bonne habitude que de la prendre ». Cette prise de conscience permet aux étudiants de se mettre à la place du patient et de comprendre ses difficultés pour initier et surtout maintenir une nouvelle habitude de vie.

Un étudiant écrit : « En tant que médecin, il faut (…) donner au patient le point de vue d’un être humain rencontrant les mêmes difficultés plutôt que de lui donner des recommandations de spécialiste ». Trouver des solutions concrètes et adaptées, procéder par étapes, fixer des objectifs raisonnables, choisir une période favorable et une activité plaisante, inviter les proches à participer au changement : voilà l’approche que ces futurs médecins veulent adopter avec leurs patients. Mais avant tout il faut faire preuve de compréhension et dialoguer avec le patient pour lui permettre de ne pas voir le changement d’habitude comme une souffrance mais plutôt comme un investissement sur sa santé, même « s’il y aura des difficultés et qu’il faudra persévérer ».

 

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Stress et détresse chez les médecins : le PAMQ rencontre les externes
 

 
 


Dr Claude Rajotte du PAMQ
photo : Louise Lefort

La détresse est un phénomène préoccupant qui touche non seulement les médecins en pratique mais également les résidents et les étudiants en médecine. Selon une étude menée par la Fédération des étudiants en médecine du Québec, 40% des étudiants en médecine vivent de l’anxiété, 19% de la dépression et 8% ont des idées suicidaires.

Il existe au Québec un organisme autonome, le Programme d’aide aux médecins du Québec (PAMQ), qui offre de manière confidentielle des services d’aide et de références aux médecins en difficulté. Pour faire connaître cette ressource aux étudiants en médecine de l’Université de Montréal, chaque année des médecins membres du PAMQ viennent les rencontrer lors de leur stage d’externat en médecine communautaire.  

Au cours de la rencontre, les externes sont amenés à identifier les sources de stress pouvant être associées aux diverses étapes de leur formation et à reconnaître les phénomènes de sursollicitation et d’épuisement professionnel. Ils sont également sensibilisés au fait que certaines circonstances personnelles et professionnelles peuvent constituer des déclencheurs de détresse (tels qu’une séparation, une plainte…), que la détresse n’est pas un phénomène isolé, qu’elle ne représente pas une faiblesse et « qu’elle ne fait pas d’eux de moins bons médecins ».

Les principaux messages que le PAMQ livre aux étudiants sont que le stress est une composante inhérente à leur formation et à leur pratique, qu’il peut être vécu différemment d’une personne à l’autre et qu’il ne faut pas sous-estimer la détresse. Pour la contrer, il faut apprendre à prendre soin de soi, à être à l’écoute des autres afin de pouvoir dépister et aider les collègues en détresse. Enfin, il faut savoir demander et recevoir de l’aide.

Reconnaître l’importance de la détresse chez les médecins et la démystifier dans le cadre même de la formation médicale est un pas important pour lever les tabous, pour la prévenir et pour agir.

 

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Détecter les patients victimes de violence : des opportunités de formation manquées?

 


 

La violence, la négligence et l’abus empruntent plusieurs formes (physique, psychologique, verbale, économique, sexuelle) et se retrouvent dans tous les groupes d’âges. Certains facteurs, notamment la grossesse, la perte d’autonomie, les situations de précarité et l’isolement social peuvent augmenter la vulnérabilité à la violence. Pour les personnes qui en souffrent, le fait de vivre de la violence peut être à l’origine ou aggraver des problèmes de santé physique ou psychologique.

Les statistiques dont nous disposons reflètent difficilement l’ampleur du problème car les victimes hésitent trop souvent à dénoncer leurs agresseurs. De tous les professionnels de la santé, les médecins sont peut-être les mieux placés pour aborder la question de la violence en relation avec les problèmes de santé de leurs patients et orienter les victimes vers les ressources appropriées susceptibles de les aider.

Afin de documenter l’importance accordée pendant la formation médicale à la prévention, la Chaire d’enseignement en prévention Lucie et André Chagnon a réalisé une étude auprès des finissants 2010 du programme de médecine de deux universités québécoises (Laval et Montréal).

De tous les stages, c’est en pédiatrie que les étudiants seraient le plus sensibilisés à l’importance de détecter les patients victimes de violence;  plus de la moitié des étudiants y ont perçu ce souci chez la plupart de leurs superviseurs. Les pourcentages sont moindres dans les autres spécialités : gériatrie (44%), psychiatrie (33%), médecine familiale (32%), obstétrique-gynécologie (26%), médecine interne (4%) et chirurgie (1%). Fait encore plus marquant, un répondant sur cinq rapporte n’avoir perçu dans aucun de ses stages cliniques que ses superviseurs jugeaient important de détecter les patients pouvant être victimes de violence.

Compte-tenu des contextes particuliers d’enseignement et des patients soignés, les stages n’offrent pas tous les mêmes opportunités de formation par rapport à la violence. Toutefois, ces données soulèvent des questions pour les responsables des divers stages cliniques sur leur contribution respective à la formation des futurs médecins au regard de cette problématique.

 

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